Chers Frères et sœurs,

L’ensemble des lectures de ce dimanche concerne l’attitude des ministres du culte ou de la religion vis-à-vis du peuple de Dieu.

L’évangile de Matthieu rapporte que Jésus au terme de son ministère, est monté avec ses disciples à Jérusalem, en ces derniers jours avant Pâques ; Il se trouve à proximité du temple où Il ne cesse d’être confronté aux scribes et aux pharisiens, ses adversaires. Jésus considère aujourd’hui, d’une manière plus générale, leur comportement auprès des fidèles. « Sans aucun doute, ils enseignent bien la Loi dans la chaire de Moïse », remarque-t-Il, mais eux se dispensent de l’observer ; ils chargent de fardeaux les fidèles, qu’eux-mêmes ne portent pas, ils aiment à se faire remarquer, à s’assurer des places d’honneur, et affectionnent à se faire appeler « Rabbis »… « Pour vous qu’il n’en soit pas ainsi ! »

Déjà vers 450 avant J.C, un faux cléricalisme, si l’on peut dire, était blâmé en Israël, par le prophète Malachie de notre première lecture ; l’avertissement qu’il proférait, il l’étayait alors sur la vérité biblique déjà très ancienne : celle « que nous n’avons qu’un seul Père, un seul Dieu qui nous a créés » ; par conséquent, comme Jésus le proclame aujourd’hui : « Nous sommes tous également frères ! »

Ainsi donc, parce que cette vérité fondamentale de l’Ancien Testament n’était plus suffisamment méditée et vécue : « les prêtres et les scribes pervertissaient l’Alliance contractée avec le Dieu Saint d’Israël ». Il constate alors, comme le prophète : « qu’ils agissent avec partialité », et qu’ils font de la Loi de Moïse, pour eux, une occasion de glorification, et « pour la multitude une occasion de chute ».

Le Seigneur Jésus ne se prive pas de déplorer cette dégradation qui s’est considérablement accrue au cours du temps ; de sorte qu’en dépit de leur charge religieuse consacrée, ils ne parviennent pas à reconnaitre – même à travers la réalisation des multiples signes salvateurs de Jésus – ses miracles de bonté vis-à-vis du peuple, la transcendance de son autorité messianique, annoncée pourtant maintes fois, dans les Écritures depuis Moïse.

Aussi Jésus ne craint pas de leur reprocher ouvertement leurs déviations arbitraires et dénonce fermement leur hypocrisie par rapport à la doctrine qu’ils prêchent : « Ils disent mais ne font pas ». Pourtant, et c’est là un paradoxe, même si celle-ci est mal observée, la Loi n’est pas supprimée ; même si celle-ci n’est pas vécue par ceux-là mêmes qui sont les premiers concernés, elle est maintenue.

En conséquence, on doit remarquer que c’est dans la « fidélité » à cette Loi de Dieu, même si elle est « médiocrement vécue » par des hommes, que s’élabore en définitive, depuis les croyants sincères, l’humilité véritable.

La fidélité apparait donc ici comme un préalable à l’humilité, car ce n’est que dans l’humilité que l’on parvient à se soumettre durablement à la loi des commandements. Seul un cœur humble peut accepter de suivre fidèlement une loi au travers des médiations humaines, parfois même tordues ! Voilà le premier pas sur la route de l’humilité que Jésus lui-même a empruntée.

Le deuxième pas auquel Il nous invite maintenant, se trouve dans la critique qu’Il fait aux chefs juifs pour combattre leur attitude mondaine qui se manifeste dans la vaine gloire, si facile à contracter pour les élites. Son antidote se trouve dans l’examen constant de l’authenticité. L’authenticité est liée à la recherche, non pas tant d’être parfait – quoique l’on puisse en garder le désir – mais à la simple volonté d’être vrai. Cette vérité qui nous rend heureux parce que nous sommes libres de tous jugements humains. Là aussi nous sommes humbles véritablement.

La vérité, c’est s’ajuster à la réalité, se placer où Dieu nous veut, selon sa volonté.

Or Jésus nous le fait entendre en déclarant : « Vous n’avez qu’un seul maître, qu’un seul Père », nous sommes donc tous devant Lui, des disciples ou des enfants ; Lui souhaite en effet que nous devenions ses serviteurs et ses amis dans le mystère du Christ.

Le Seigneur veut pleinement nous saisir dans son intime filiation divine, et c’est bien à cela que nous invite la participation de la célébration eucharistique, par laquelle le Seigneur vient à nous dans l’extrême humilité et douceur de l’Hostie consacrée. Amen !

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