Chers frères et sœurs,

Nous faisons nôtre, l’éloge infatuée des pharisiens adressée à Jésus pour le flatter de sa sagesse. De fait, Il est bien Maître, parce qu’Il enseigne le vrai chemin vers Dieu ; Il est vraiment libre, parce qu’Il ne se laisse influencer par personne, et Il reste impartial puisqu’Il ne fait pas de différence entre les gens.

Pourtant ils omettent une qualité que les apôtres avaient perçue, Pierre et Jean en particulier, celle qui lui est propre : Il connait le fond des cœurs !

Or, c’est bien cela que Jésus va leur révéler en premier lieu, avant même de leur répondre. Il ne va pas craindre de les invectiver en les traitant comme Il les discerne en vérité : des Hypocrites !

« Pourquoi me mettre dans l’embarras ! »

Ils n’attendent pas en effet, un conseil ou une explication, ils exigent de Lui une réponse immédiate qui coupe court à toute éventuelle dérobade; ils l’agressent en quelque sorte : « Dis-nous ton avis, est-il permis oui ou non de payer l’impôt à César ? »

S’Il dit oui, Il s’affiche comme collaborateur, on le traitera de publicain ; s’Il dit non Il se pose en contestateur, on le traitera de zélote. Quoiqu’il dise, raisonnent-ils, Il est pris, et s’Il se tait, Il se déjuge. Mais alors n’en restent-ils pas à une dialectique purement horizontale, exclusive ?

Malgré cela le Christ va accepter de répondre à ses adversaires ; pourtant, ce n’est pas au simple niveau moral : du permis ou du défendu, mais à un niveau supérieur qui le surplombe (plus englobant, qui intègre l’opposition) qui est, pourrait-on dire, celui du Juge suprême : celui du Fils de l’homme, qui lui est tout-à fait propre.

Les pharisiens vont être contraints au silence, un silence inattendu qui pourrait les inviter à la conversion.

La présentation de la pièce de monnaie sert à résoudre le problème : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Cette formule lapidaire est devenue une maxime, l’une des paroles du Christ les plus connues à travers le monde. Cette sentence est universelle parce qu’elle est devenue une référence majeure d’une réflexion politique, non pas seulement chrétienne ; elle vaut aussi pour l’ensemble des religions, car elle concerne le problème délicat des rapports parfois brûlants de la religion et de l’état. Diverses argumentations politiques n’ont-elles pas données lieu récemment dans notre pays à des résultats finalement controversés ?

La question demeure complexe dans la pratique encore aujourd’hui, comme c’est souvent le cas d’ailleurs pour d’autres questionnements de société.

Car lorsqu’intervient le libre exercice de la conscience de chacun en face d’une communauté d’hommes et de femmes de plus en plus plurielle, et dont une partie peut être parfois même hostile, il est alors souvent difficile de trouver un point de vue général humain, et d’adopter une juste position, même temporaire.

Sur le principe, par conséquent, la réponse de Jésus reste toujours valable. À la question de payer l’impôt à César, il convient de considérer en bonne justice, ceux qui gèrent les biens publics en vue du bon ordre et de leur bonne répartition dans la vie sociale. Il est donc légitime et normal de payer l’impôt.

Il revient cependant de respecter les exigences de chaque partie : l’état et la religion, de bien savoir les articuler en s’efforçant toujours de répondre, dans tous les cas, au principe chrétien supérieur du double commandement du Christ : « d’Aimer Dieu et d’aimer son prochain ».

Ne sommes-nous pas appelés, tous, à privilégier en toute circonstance la communion avec Dieu ?

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