Homélie du Dimanche 1er Décembre 2019

1er Dimanche de l’Avent – Année A

Par le P. Michel Hubeau

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur – Le style oral a été conservé

 

Dans ce discours eschatologique de Matthieu, Jésus vient d’écarter toute spéculation sur la date de la fin du monde, tout en affirmant clairement que sa venue ultime, Lui, le Fils de l’homme, est inéluctable.

Mais la communauté judéo-chrétienne de Matthieu est déjà affrontée à l’épreuve de la durée. Aussi, pour inviter chaque croyant à gérer intelligemment le temps de notre histoire et à se tenir prêt à la manifestation ultime du Christ, Matthieu va regrouper quatre petites paraboles dont le fil directeur est la vigilance. Ce premier dimanche de l’Avent nous en rapporte deux : celle du déluge et celle du voleur.

« L’Avènement du Fils de l’homme (en grec, on dit la Parousie) ressemblera à ce qui s’est passé à l’époque de Noé… les gens ne se sont doutés de rien, jusqu’à ce que survienne le déluge : tel sera aussi la venue du Fils de l’homme …Veillez donc, car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur vient ».

En évoquant ce déluge Matthieu ne cherche pas à affoler sa communauté mais à leur rappeler le caractère inéluctable et imprévisible de la « venue de Jésus, le Fils de l’homme » (une expression qu’Il répète deux fois).

D’ailleurs Matthieu ne souligne pas ici l’inconduite de ceux qui furent engloutis mais leur imprévoyance : la vie suivait son cours habituel, on mangeait, on buvait, on se mariait… et personne ne se doutait du fait que notre vie est toujours suspendue à un évènement imprévisible capable de bousculer tous nos projets.

La venue du Fils de l’homme aura la même soudaineté.

Notre mort, comme un déluge, inattendue, peut nous surprendre « en plein milieu de nos occupations quotidiennes » dit Matthieu. Alors l’un « sera pris » pour son salut, comme autrefois dans l’arche de Noé, l’autre sera « laissé ». Ce qui est vrai pour l’ensemble de l’humanité l’est aussi pour chacun de nous.

Matthieu ne dit pas ici en fonction de quoi se fera ce tri dramatique, il se contente d’une première conclusion : Veillez donc, car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur vient !

Nous entrons dans ce temps de l’Avent, chers Frères, qui superpose toujours les trois venues du Seigneur Jésus : sa venue dans l’histoire, à Noël, à Bethléem, que nous célébrons ; sa venue dans notre propre itinéraire au carrefour de nos vies ; et sa venue à la fin des temps.

L’Avent est toujours un temps de vigilance. Vigilance active parce que nous sommes souvent dans l’éparpillement de l’urgence, dans la superficialité ou dans l’accaparement par nos soucis légitimes, familiaux ou professionnels. Et en ce temps de l’Avent, l’Église nous invite à retrouver une certaine vigilance intérieure active, d’abord dans la prière. C’est un temps privilégié où peut-être il faut prendre du temps gratuit : s’assoir pour ruminer la Parole.

Un temps aussi d’engagement toujours plus actif au service de nos frères. Car finalement à notre mort, la seule question que Jésus nous posera, c’est : « Qu’as-tu fait de cette étincelle de vie, de cette parcelle d’amour que je t’avais confiée pour semer de l’amour ? ». Le seul critère, ce sera la qualité de nos relations, de notre amour. Cet amour qui est le seul capital qui ne se dévalue pas.

Dans la deuxième parabole, la venue du Fils de l’homme est aussi imprévisible que « la venue d’un voleur qui vient percer le mur de la maison » dit Mathieu. Vous savez que dans les anciennes maisons de Palestine, c’était plus rapide de percer silencieusement le mur qui était fait de terre séchée que de vouloir forcer la porte. Il faut donc être prêt à tout moment ! D’ailleurs St Paul, vous l’avez entendu dans la deuxième lecture, nous redit « qu’il est temps de sortir de notre sommeil », de notre torpeur spirituelle… qui est le plus grand danger – Paul l’avait bien perçu – qui guette toute communauté chrétienne, même monastique.

« Revêtons-nous pour le combat de la lumière… Rejetons les activités des ténèbres. »

Et St Paul avait déjà, dans sa Lettre aux Thessaloniciens, comparé la venue du jour du Seigneur à celle d’un voleur. Et dans l’évangile de ce jour, Matthieu va encore plus loin ! Puisque c’est le Fils de l’homme, Lui-même, qui est comparé au voleur.

À l’Église de Sardes, dans le Livre de l’Apocalypse, Jésus dit : « Allons ! Rappelle-toi comment tu accueillis la parole : garde-là et convertis-toi. Car si tu ne veilles pas, je viendrai comme un voleur sans que tu saches à quelle heure je te surprendrai » (Ap.3, 3).

Le temps de la vie chrétienne, de l’Église, c’est donc bien celui de la foi vigilante. Le temps où chacun doit apprendre à discerner la croissance, la lente émergence du Royaume, c’est-à-dire ce Règne de l’amour dans la banalité du quotidien. Un temps au cours duquel il faut cultiver une certaine « intelligence spirituelle » pour discerner cette Présence du Seigneur qui n’en finit pas de venir dans notre vie personnelle et collective.

L’exode messianique ne s’est pas arrêté avec l’Évènement Jésus-Christ ! Au contraire, Jésus a entrainé ses frères, le Peuple de la Nouvelle Alliance, dans son « exode pascal » vers la véritable Terre Promise, celle du Royaume de Dieu. L’Église n’existe pas pour elle-même, l’Église n’existe que pour orienter l’humanité vers ce Royaume que Jésus nous a ouvert et qu’Il inaugure en sa Personne. La vie chrétienne est une marche dynamique animée par l’Esprit qui murmure en nous « Viens, Seigneur Jésus ».

Mais est-ce que les chrétiens attendent encore vraiment la venue ultime de Jésus…

Et ce récit est bien cadré par cette répétition du verset : « Tenez-vous donc prêts, vous aussi : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. »

Historique de nos Homélies

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