Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.

Frères et sœurs bien aimés,

Les lectures de ce jour et des prochains jours de cette dernière semaine de l’année liturgique, nous parlent de l’eschatologie, c’est-à-dire : la Parole sous les fins dernières. Un jour tout s’arrêtera, tout sera transformé. Et la liturgie de l’Église, la Parole de Dieu qui nous est donnée, est là pour nous éclairer et pour nous parler de ce passage mystérieux. L’Écriture ne donne pas de précisions, ne décrit pas comment les choses vont se passer ; elle donne le sens et le contenu existentiel de ce que nous devons faire, de ce à quoi nous sommes appelés.

Et donc, les lectures de ce jour, notamment l’évangile, nous parlent de ce qui va arriver : une forme d’Apocalypse (dans le langage courant : c’est la fin, ça fait peur, on terrorise tout le monde « c’est l’apocalypse qui arrive »). Le mot ‘apocalypse’ dans la Bible veut dire ‘Révélation’ : c’est la Parole de Dieu qui révèle le sens de l’histoire, des évènements présents et futurs. Certes, il y a des choses graves mais le sens premier est là ; ce n’est pas pour faire peur, au contraire, le chrétien est appelé à vivre dans la paix et la joie et non dans la peur. C’est l’antithèse de l’Évangile, la peur !

Nous sommes appelés à écouter ce que nous dit Jésus : Jésus parle en quelque sorte à trois degrés (comme dans un théâtre, avec trois plans de proximité ou d’éloignement).

Tout d’abord, Il parle de son époque : Tout ce que vous contemplez… (Il parle du Temple de Jérusalem qui était très beau ; il reste la base, le mur des lamentations, qui est une des bases du Temple de Jérusalem)… ce temple sera détruit… et de fait, c’est ce qui s’est passé quarante ans plus tard ; en l’an 70, le Général Titus (qui devient après Empereur des romains) rase le Temple ; face à la révolte des juifs, il emploie la manière forte, il exécute des milliers de juifs et il fait raser le Temple : il ne reste pas pierre sur pierre ! – Et pour ce témoignage extra-biblique, vous pouvez lire Flavius Josèphe, un écrivain de cette époque, qui a écrit la guerre des juifs.

Jésus nous parle tout d’abord de son époque : de la période dans laquelle Il vit ; Il sera mort et ressuscité quelques mois après, mais quarante après il se passera cette réalité : le Temple sera rasé.

Le deuxième plan, c’est l’histoire humaine, le cours de l’histoire humaine avec des guerres ; ce que décrit Jésus est continuel dans l’histoire humaine : des guerres, des tremblements de terre, des épidémies… ça appartient à notre vie, cela ne veut pas dire que c’est la fin tout de suite…

Puis la fin ultime, le dernier jour, la dernière heure, la dernière minute, où le Christ va se manifester en gloire ; un jour, cela arrivera ! Cela appartient à notre foi.

Et donc, l’Écriture Sainte nous appelle aujourd’hui à garder les yeux sur la ligne d’horizon : on va vers cela. Il y a un délai, plus ou moins court ou plus ou moins long, on ne sait pas.

Nous sommes appelés à garder les yeux de notre foi, de notre cœur, de notre âme, sur cette ligne d’horizon ; nous allons vers ça, cela va arriver ! C’est un indicatif futur, c’est pas un conditionnel ! le Christ reviendra dans la gloire.

Nous sommes appelés à qualifier notre vie, l’orienter, en fonction de cette destinée ; c’est un éclairage, si vous voulez ; c’est comme dans la nuit : on marche dans la nuit, dans la campagne, on n’y voit pas très bien mais il y a une lumière qui nous attire, et on va vers cette lumière ; ça nous oriente, on tâtonne, on tombe, mais on avance. La Parole de Dieu, la Parole de Jésus, est une lumière qui nous appelle, qui nous attire, pour vivre selon sa volonté et pour être conforme à la destinée qui nous attend. Nous savons la fin, donc prenons les moyens pour aller vers cette fin.

Nous pourrions retenir trois éléments en ce dimanche, pour les méditer, pour prier (puis pour les mettre en pratique surtout !) :

Tout d’abord, cette lumière nous éclaire tout au long de notre vie, c’est pas que ce dimanche matin !

Tout au long de notre vie, cette lumière est là pour nous apprendre où nous allons, et ce qu’il faut faire pour aller vers ce chemin. Jésus nous dit : Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nous sommes appelés à marcher sur ce chemin qui est Jésus et à unifier notre vie en fonction de cette destinée ; ainsi, à mettre de l’ordre dans notre vie, à faire un peu du nettoyage intérieur.

Et de donner une hiérarchie des valeurs, une hiérarchie des priorités : qu’est-ce qui est numéro un dans ma vie ? Vous pouvez vous poser la question. Quand je parle de la vie, c’est pas de la vie quotidienne mais de l’orientation de la vie. Et ensuite, qu’est-ce qui est numéro deux, trois, etc… pour savoir si je suis dans la lumière du Christ ? Ou bien est-ce que je fais passer mes idées, mes désirs, mes égoïsmes, mon péché… avant la volonté de Jésus ?

Le deuxième élément, c’est de marcher à la lumière du Christ. Le Christ, certes, est lointain ; Il nous éclaire ; sa Parole nous éclaire sur l’avenir, mais cette Parole nous accompagne. Jésus est toujours avec nous – le psaume 118 dit : Ta Parole est la lumière de mes pas… (Comme une lampe torche : vous éclairez et vous avancez dans la nuit, dans le brouillard).

Nous sommes appelés à avoir des antibrouillards quand les évènements de la vie deviennent plus difficiles, quand la densité de la vie devient plus épaisse, quand on ressent la pesanteur de la vie. Mais Jésus est toujours là. Toujours là et Il nous accompagne, il y a une phrase que dit Jésus dans l’évangile qui est centrale aujourd’hui : C’est moi ! …C’est moi toujours présent, c’est moi qui vous inspirerais. Nous n’avons pas à nous faire du souci pour savoir comment les choses vont se passer ; comment je vais faire ; qu’est-ce que je vais répondre…etc…

Jésus est là. Il nous inspirera au bon moment ; nous sommes appelés à faire notre devoir quotidien, simplement. À être des serviteurs simples, ordinaires, en famille, dans la vie sociale, dans la vie monastique, partout… être des serviteurs, faire ce que nous devons faire… Pas rêver, à vivre dans un monde éthéré ! Rester concret. Cependant, avec la lumière que Jésus nous apporte ; pas simplement la lumière que Jésus nous apportera mais la lumière que Jésus nous donne aujourd’hui.

Aujourd’hui nous sommes appelés chacun et chacune à suivre la lumière que nous avons dans notre âme. Dans notre conscience (tous, chacun, chacune), nous avons une lumière ce matin : qu’est-ce que je dois faire ? Ne pas faire ? Se fier à cette lumière, qualifier cette lumière.

Il y a une question d’intensité. C’est un peu comme avec les leds : ça éclaire mais il y a une question d’intensité, on peut y mettre davantage d’intensité de lumière. Et là, il n’y pas d’économies à faire ! Cela nous permet de suivre davantage le Christ. Jésus nous accompagne, Il nous donne sa lumière.

Enfin, nous sommes appelés à un engagement renouvelé dans notre monde. Cela pourrait nous décourager, nous désengager, en disant : « le Christ va venir en gloire… on va vers le Royaume de Dieu… donc on attend ! »… Le Seigneur nous demande de nous engager dans le monde… pourquoi ? Parce que justement le monde a une fin qui est le Christ-Jésus, Roi de l’Univers, que nous fêterons la semaine prochaine, dimanche prochain, le dernier dimanche de l’année liturgique.

Le monde a un sens, il a une finalité qui est donnée par Dieu. Nous allons vers cette transformation du monde qui sera donnée par Dieu. Mais en attendant nous sommes appelés à nous engager dans la vie du monde, à être porteur d’espérance pour cette fin ultime et pour témoigner de la Présence actuelle de Jésus dans le monde.

Il y a une double attitude à avoir ; à savoir : être porteur d’espérance, d’une espérance qui est dans le futur mais une espérance qui est déjà accomplie par la Présence du Christ… et en vivant soi-même de cette Présence du Christ, d’ouvrir les autres à cette Présence.

La vie chrétienne est une question de relation avec le Christ. Si nous restons au niveau cérébral ou intellectuel : « je crois… Dieu existe… le Christ est ressuscité »… mais nous ne changeons rien dans la vie, à quoi cela sert-il ? Comme si vous invitez quelqu’un à manger avec un bon repas et on peut pas manger !

Nous sommes appelés à vivre de la vie de Jésus, à vivre de la vie du Christ, que Jésus soit vraiment quelqu’un dans notre vie, tout au long de la journée. De vivre de Lui et de témoigner de Lui ; de témoigner de son amour, d’être porteur d’espérance dans un monde qui n’a plus de finalité. Pourquoi notre monde va mal ? Il va mal déjà depuis longtemps ; st Augustin disait : Le monde est déjà vieux ! Il y a dix-sept siècles en arrière, donc ça ne date pas de ce matin !

Nous sommes appelés à vivre de cette espérance. Beaucoup de nos contemporains sont découragés, désespérés, ils ne savent plus ; ils sont démotivés.

On parle de démission silencieuse dans le travail : le minimum syndical et même légèrement en-dessous, pour éviter de se faire licencier- toujours gênant – mais en même temps, de vivre dans son cocon… Il peut y avoir spirituellement une démission silencieuse, c’est-à-dire on n’est plus investi ; on croit de manière théorique mais on n’a plus cette ferveur qui nous habite… ce feu de l’Esprit.

Nous sommes appelés ce matin à recevoir Jésus pour nous laisser embraser à nouveau, et être rempli de cette foi qui n’est autre que la relation avec Lui, une relation vivante qui nous entraine, et d’être porteur d’espérance. L’Espérance avec une grand E !

Nous sommes appelés à être témoin de cette Présence du Christ dans le monde et d’ouvrir nos frères et sœurs en humanité à cette lumière, à cette vie, à cet amour.

Amen !

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