Frères et sœurs bien aimés,

Jésus dans les évangiles synoptiques nous parle en parabole : c’est-à-dire à partir de réalités humaines, agricoles, commerciales, les rapports humains, le Seigneur donne un enseignement pour nous introduire et nous orienter vers la réalité supérieure du Royaume de Dieu, du Royaume des cieux ; ce Royaume pour lequel nous avons été créés, sauvés, et pour lequel nous combattons toute notre vie en tant que chrétiens pour être fidèles à nos promesses baptismales. Jésus nous parle de façon simple afin que nous puissions appréhender le commencement de son Royaume et nous mettre en route, nous mettre en marche.

Si le peuple d’Israël a été choisi, c’est d’abord la personne de Jacob : le Seigneur après le torrent du Yabbok change son nom de Jacob en Israël, c’est-à-dire « fort contre Dieu » ; cet homme, cette personne, Jacob, va donner le nom à son clan – il y a 70 personnes qui l’accompagnent en Égypte, il va devenir le peuple d’Israël. À partir d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, le Seigneur veut élargir à toute l’humanité ; il appelle des personnes à vouloir collaborer à son œuvre pour l’élargir à toute l’humanité. Dans la grâce divine, il n’y a pas de propriété privée. Toutes les grâces sont pour tous mais elles sont données parfois à un homme, une femme, pour peu à peu irriguer tout le corps de l’humanité.

Le peuple d’Israël a reçu ce don extraordinaire de préparer la venue du Messie à travers les siècles : accueillir ; et c’était la responsabilité des plus hauts responsables du Sanhédrin, des grands prêtres, du cercle des familles sacerdotales d’Israël qui dirigeaient le Sanhédrin, qui avaient le pouvoir religieux, politique et judiciaire, d’attendre, de discerner et d’accueillir le Messie, celui qui est l’Oint du Seigneur et qui apporte le Salut.

Mais ces mêmes autorités du temps de Jésus, non seulement n’ont pas accueilli le Messie mais l’ont rejeté, l’ont crucifié ; il ne faut pas oublier la Parole que Jésus dit à Pilate : « Celui qui m’a livré à toi a un péché plus grave que toi »…

Le Seigneur nous appelle à prendre conscience de notre responsabilité personnelle dans l’accueil de la grâce ; sur la croix, quelques heures plus tard, Jésus dira : « Père, pardonne leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ! ». Prendre conscience. À partir des péchés personnels de ces personnes : puisque l’évangéliste Luc nous dit que Pilate savait très bien que c’était par jalousie que les chefs des prêtres avaient livré Jésus au pouvoir romain : la jalousie ! Cette même jalousie qui nous remonte à Satan et qui, par jalousie, nous dit le Livre de la sagesse : la mort est rentrée dans le monde par la jalousie du Diable. Ce poison de la jalousie qui infecte toute la vie de l’humanité, tout le péché, qui est le fruit de l’orgueil, la mise en application de l’orgueil, et qui est l’autodestruction de l’être humain.

Jésus nous pardonne ; il pardonne à tous les responsables ; Jésus portant tous les péchés de l’humanité et le nôtre propre, nous fait miséricorde, nous introduit dans cette miséricorde. Comme le dit l’apôtre st Paul, l’appel de Dieu et ses dons sont donnés de manière irréversible et définitive. Ce que Dieu a donné à Israël, Dieu ne le reprend pas.

Le Seigneur à travers son Fils Jésus de Nazareth, vrai Dieu et vrai homme, appelait Israël à : accueillir le Messie qu’il était, le Christ, le sauveur du monde, (et appelait Israël) à cette ouverture, cet élargissement à toute l’humanité. Ce qui était déjà annoncé dans Ezechiel mais aussi dans la finale du livre d’Isaïe où le salut est proclamé à tous les peuples ; et tous les peuples viennent à Jérusalem de manière figurative mais réelle, pour adorer le vrai Dieu.

Le Seigneur Jésus fonde, et vivifie son Église pour que ce Salut, cette connaissance de l’amour du Père manifesté dans son Fils dans la puissance de l’Esprit Saint, soit accueilli par tous les peuples, toutes les cultures, toutes les personnes sans exception dans le temps et l’espace.

Nous sommes appelés… nous, en tant que membres de ce nouveau peuple de Dieu, qui est la continuation d’Israël, et son élargissement et sa ressaisie par l’incarnation du Verbe, la rédemption sur la croix et le don de sa résurrection qui nous fait participer à sa vie… nous sommes appelés à avoir ce sens de la responsabilité pour nous laisser vivifier par Jésus ; avant d’annoncer le Christ aux autres, il faut le recevoir Lui-même et vivre de Lui, sinon nous risquons d’être des perroquets qui répètent des choses sans les vivre !

Nous sommes appelés vraiment à nous laisser vivifier par le Christ, vivre en amitié avec Lui, nous laisser saisir par notre Frère ainé qui est le Christ Jésus, et nous laisser conduire par Lui ; que toutes les dimensions de notre personne, de notre vie, soient irriguées, illuminées et vivifiées par Lui. À partir de là, nous pouvons témoigner du Seigneur et annoncer son amour à tous les hommes, à tous les êtres humains, à tous – à commencer par nos plus proches, même si des fois la résistance est la plus dure. Nous sommes appelés à témoigner aussi à ceux qui sont à l’extérieur, qui ne connaissent pas Jésus ; notre culture contemporaine en France, en Europe aujourd’hui, est une culture néo païenne… c’est un constat ! Et nous sommes appelés, par rapport à ce tabula rasa, à cette place libre où beaucoup de personnes n’ont pas d’a priori (ce qui était le cas il y a quelques décennies en arrière), à annoncer avec fraicheur le Christ ressuscité, afin que ces personnes, nos frères en humanité, puissent devenir nos frères et sœurs dans le Christ.

Et là nous avons une part de responsabilité ! Il n’y a pas que le grand prêtre ou les grands prêtres du temps de Jésus qui ont refusé d’accueillir Jésus, au moins de se laisser vraiment interrogés et avancer, mais qui ont biaisé pour maintenir leur autorité, leur pouvoir, leur « je-ne-sais-quoi » !

Nous sommes appelés à nous laisser transformer, transfigurer par le Seigneur tant sur le plan personnel que communautaire. Nos communautés chrétiennes, qu’elles soient monastiques, paroissiales, ou autres, sont appelées à être des foyers de lumière ; sommes-nous vraiment des foyers de lumière ? Des foyers d’accueil, ouverts, charitables, dynamiques, missionnaires ? Parfois on peut légitimement se poser la question… C’est par capillarité que le Seigneur va constituer, comme une nouvelle évangélisation pour se faire connaitre à nos frères et sœurs en humanité aujourd’hui.

Alors, demandons cette grâce durant cette Eucharistie : de nous laisser saisir toujours plus par le Seigneur Jésus ; que cette expérience du Christ ne soit pas simplement de belles théories, des choses qu’on écoute… mais un vécu existentiel pour chacun et chacune d’entre nous ; et toujours à développer, toujours à progresser. Nous ne sommes pas arrivés au Ciel !

Ici-bas, c’est toujours une lutte, un combat, une avancée, ce n’est jamais fini ; il y a une vigilance à avoir.

Et, de témoigner par notre vie déjà, notre vie intérieure aussi même si ça ne se voit pas, notre vie de proximité : vie exemplaire, mais aussi par l’annonce de la Parole, il ne faut pas avoir peur d’annoncer, nous ne sommes pas des chiens muets ! Parce que le Seigneur pourra nous reprocher un jour « tu savais les choses et tu ne l’as pas dit ! ».

Nous sommes appelés à annoncer la Parole de Vie, et nous laisser transformer en canal de grâce, en instrument de lumière – mais pas un instrument comme un marteau ou un clou – mais des personnes qui collaborent de manière consciente, intelligente, amoureuse, et de manière volontaire et libre, à l’action de Dieu dans notre propre vie, dans celle de l’Église et celle du monde.

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