Où es-tu ? Où donc es-tu ? Cette demande, ce cri du Seigneur envers Adam, est le cri du Créateur, du Père, qui cherche sa créature, qui cherche celui avec qui il doit avoir une relation filiale.

Où es-tu ? Cette demande du Seigneur, frères et sœurs bien aimés, s’adresse ce matin à chacun et à chacune d’entre nous. Où es-tu ? Où en es-tu avec Dieu ? Comment regardes-tu ton Créateur ? As-tu peur de lui ? Est-ce que tu le crains comme un juge qui va te frapper ? Il va faire une enquête très sévère sur toi… ou qui te condamne du matin au soir et du soir au matin…

Où es-tu ? Où en es-tu avec tes semblables, et tes frères et sœurs en humanité ? À les regarder comme des frères et sœurs ? Ou comme des adversaires, des rivaux ?

Où es-tu ? Où en es-tu avec toi-même ? Comment te reçois-tu ? Comment t’acceptes-tu ? Ou quelle est la haine qui t’habite envers toi-même ?

Oui, frères et sœurs, nous sommes appelés à choisir entre deux anges :

l’ange Gabriel, ceux qui sont les porteurs de la Parole de Dieu, ceux qui vivent dans l’humilité, l’obéissance, l’amour, et qui sont des serviteurs de Dieu, des envoyés, des messagers de Dieu ;

et d’autres anges qui ont été créés bons mais qui se sont pervertis et qu’on appelle : les démons. Et qui gardent leur puissance angélique, leur pouvoir de séduction, de mensonge, et au fond de perversité.

Oui, la tentation appartient à notre vie ; personne ne peut y échapper ; c’est la réalité ordinaire de la vie. Mais le serpent – non pas la matérialité du serpent mais l’image qu’il représente – met le doute sur Dieu, met le doute sur la bonté de Dieu à notre égard, met le doute sur la vérité de sa Parole… Est-ce que tout cela est vrai ? Est-ce que nous ne sommes pas dans l’illusion ? Une belle fable, une belle mythologie… comme si Dieu usait de duplicité ? Et comme si nous étions retenus, freinés, par la réception de la Parole de Dieu.

Une question, oui, mais une question empreinte de doute ou de soupçon, de poison du soupçon. L’ange quant à lui, et dans le cas présent l’ange Gabriel, viens vers Marie de Nazareth, l’Immaculée que nous fêtons aujourd’hui, et ses propos, son être, sont lumière, sont dans la clarté de Dieu, l’intelligibilité du discours, sa cohérence, sa concision, la vérité.

Oui, Marie pose une question, mais elle pose une question pour mieux comprendre ; et surtout pour mieux répondre à la volonté de Dieu, et mettre en acte ce que le Seigneur lui demande. Marie donne sa foi. Marie fait mémoire. Marie rend grâce. Marie consent. Marie agît, et elle fait confiance. Oui, Marie qui est notre mère, Jésus nous l’a donnée quand il était cloué sur la croix, quelques instants avant de remettre son Esprit à son Père et d’avoir le cœur transpercé.

Ce Cœur d’où jaillit l’Esprit Saint, d’où jaillit l’Église, son épouse, d’où jaillissent les sacrements de l’Église, notamment le Baptême et l’Eucharistie, symbolisés par l’eau et le Sang du Christ. Ce même Sang qui se rend présent dans le mystère de l’Eucharistie, à travers le mystère de la consécration sacramentelle.

Oui, Marie donne sa foi, sa réponse, et non seulement de manière extérieure, mais son être le plus profond et sa vie ; ainsi elle peut devenir la Mère de Dieu dans tous les sens du terme, et la Mère de l’Église. Et Marie répond sans retenue, sans frein, sans aucun soupçon ou sans repli sur soi-même. Elle contemple Dieu, elle ne se contemple pas elle-même.

Marie fait mémoire, surtout dans le Magnificat, elle ne ressasse pas le passé : ressasser le passé avec amertume, avec rancœur. Marie rend grâce ; elle n’égrène pas des reproches ; elle n’égrène pas les éléments négatifs qui existent autour d’elle et dans le monde. Marie consent ; elle ne passe pas son temps à examiner si les aspects psychologiques et sociologiques de la situation conviennent à sa sensibilité. Marie s’offre totalement à Dieu.

Oui, Marie agit ; elle passe aux actes : « Voici la servante du Seigneur » – plus exactement : « voici l’esclave du Seigneur ». Elle œuvre pour accomplir la Parole du Seigneur, la volonté de Dieu.

Hier dans l’Évangile, le Seigneur Jésus disait : « c’est pas ceux qui me disent : « Seigneur, Seigneur » qui iront au paradis, mais ceux qui font la volonté de mon Père qui est aux cieux ». Ça n’empêche pas de dire « Seigneur, Seigneur » … mais il faut accomplir ce que le Père du Ciel nous demande.

Marie laisse Dieu agir en elle. Elle n’est pas la première protagoniste de sa vie. Elle se reçoit de Dieu. Elle se laisse guider par le Seigneur.

Cela suppose ce silence intérieur ; cela suppose cette distanciation par rapport aux évènements heureux ou malheureux, afin de garder sa liberté et son discernement pour accomplir la volonté de Dieu ; ne pas être saisi et bouleversé ; bouleversé, ce n’est rien, mais être renversé par ce qui nous arrive.

Oui, Marie laisse Dieu agir en elle. Elle n’analyse pas sans cesse, elle consent ; elle consent à la Parole de Dieu. Marie fait confiance ; elle met sa foi en Dieu, elle s’abandonne à lui.

Avec son Fils, et en lui, elle accueille le Seigneur sur le chemin de la vie tel que le Seigneur se donne à elle dans les circonstances des temps et la manière que Dieu a choisie. Sachant que la Croix, la Croix de Jésus son enfant, sera le passage obligé… la Pâque obligée par la colline du Golgotha ; mais ce passage, cette Pâque, conduit avec certitude à la lumière de la résurrection et de la vie pour tous.

Alors, nous pouvons prier les uns pour les autres, pour tous les membres de l’Église, pour toute l’humanité, surtout ceux qui sont en proie aux divisions, aux guerres, au péché, au Mal qui déchire l’être humain, qui meurtrit l’humanité… de demander pour chacun et chacune la grâce de la foi, non pas une foi superficielle, intellectuelle, où l’on comprend les choses mais on ne les vit pas mais cette foi qui est vivante, vivifiante, qui nous met en marche.

Oui. Et avec Marie de faire mémoire des événements de la vie, de l’histoire du salut et de notre histoire personnelle.

De rendre grâce ! D’égrener, non pas nos rancœurs, mais d’égrener tous les dons de Dieu, tout ce que nous avons reçu, à commencer par notre conception dans le sein de notre mère. De rendre grâce avec Marie, de rendre grâce, parce que Dieu est Dieu.

Dieu nous a créés. Il nous aime. Il nous a sauvés. Il nous appelle à être ses enfants et à vivre en frères et sœurs.

Et de rentrer dans son consentement, de discerner certes, mais de consentir pleinement à la volonté de Dieu, et ne pas chipoter mais d’accepter la croix comme elle se présente.

D’agir avec Marie, de passer aux actes, d’être des hommes et des femmes concrets et non pas velléitaires, qui vivent de manière platonique, mais qui rentrent dans le concret, dans la chair de la vie humaine.

Et de faire confiance envers et contre tout, parfois envers et contre tous ! De faire confiance.

Le Seigneur nous accompagne, Il nous a accompagné, Il nous accompagnera. C’est vrai pour tout être humain et pour toute situation ; même les situations qui semblent les plus désespérées, les plus tragiques et les vies brisées… l’avenir bouché, ou pas d’avenir pour certaines personnes sur la terre. Le Seigneur est là. Il y a un avenir pour tous !

Oui, nous sommes appelés à faire confiance afin que notre vie devienne vraiment ce que Dieu veut pour nous. Dieu nous a créés pour un dessein, un dessein d’amour. Il nous appelle simplement à le rejoindre par la confiance, dans l’abandon qui n’est pas une démission de soi, mais qui est un décentrement qui engage toutes nos facultés humaines d’intelligence, de volonté, de force, mais éclairées par la volonté de Dieu, éclairées par l’Esprit Saint, afin de répondre amour pour amour envers le Seigneur ; et d’accomplir le dessein créateur qu’Il a eu pour chacun et chacune d’entre nous au moment où nous avons été conçus.

Nous ne sommes pas le fruit d’un accident ou d’un hasard ! Dieu nous a voulus. Il nous appelle à répondre à son amour et à accomplir le dessein de miséricorde qu’il a sur nous.

Alors en cette fête, en cette solennité de l’Immaculée Conception, laissons-nous saisir par la puissance de l’Esprit Saint, par la miséricorde du Seigneur, par Marie qui est notre Mère dans l’ordre de la grâce. Afin de rentrer davantage, aujourd’hui, dans ce dessein d’amour que le Seigneur a posé sur nous et qu’Il veut accomplir et faire fructifier dans la gloire de l’éternité. Amen !

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