Chers frères et sœurs,
voici que les mages arrivent à la grotte, ou plus exactement dans la maison, comme nous dit le texte sacré, où se trouvent Marie, Joseph et l’enfant Jésus.
Ces personnages venus de l’Orient, nous dit le texte inspiré, ne sont pas les derniers mais les premiers de la grande procession de tous ceux qui, à travers toutes les étapes de l’histoire, savent reconnaître le message de l’Etoile, savent marcher sur les routes indiquées par les Saintes Écritures, et savent aussi trouver celui qui, en apparence, est faible et fragile : un bébé, mais qui, en revanche, a le pouvoir de donner la joie la plus grande et la plus profonde qui soit, au cœur de l’homme.
Quand ils virent l’Etoile, venons-nous d’entendre, ils éprouvèrent une très grande joie.
Ainsi en est-il, frères et sœurs, de tous ceux qui, à un moment ou l’autre de leur existence, rencontrent le Christ Jésus vivant.
Or, beaucoup de personnes ont vu l’Etoile, mais seules quelques-unes en ont compris le message.
« Nous aussi, frères et sœurs, en reconnaissant le Christ Jésus comme notre roi et prêtre, mort pour nous, nous l’avons trouvé comme si nous avions offert de l’or, de l’encens et de la myrrhe, écrit Saint-Augustin poursuivant, il ne nous manque que d’en témoigner en prenant une route différente de celle que nous avons emprunté pour venir ».
Et cette route, nous la découvrons en cheminant dessus.
Les messagers de cette rencontre de l’Enfant Dieu, et le témoignage qui s’en suit, s’opère en des hommes, les mages, qui sont totalement étrangers à la Révélation biblique du peuple de Dieu, du peuple élu.
Des hommes, semble-t-il, qui viennent de loin, non seulement géographiquement, mais culturellement. Ils viennent d’un autre monde : un monde sous le règne de l’astrologie.
Saint-Grégoire de Naziance, au cinquième siècle, dit que : « Le moment où les mages, guidés par l’étoile, adorèrent le nouveau roi, le Christ… Ce moment, dit Grégoire, marqua la fin de l’astrologie parce que désormais les étoiles tournaient selon l’orbite déterminée par le Christ ».
De ces mages, frères et sœurs, nous pouvons dire, me semble-t-il, que quatre attitudes les caractérisaient. Comme les appelle la tradition : Melchior, Balthazar et Gaspard, ces mages, ce sont tout d’abord des hommes qui cherchent.
Et que cherchaient-ils ? Ils cherchaient les traces de Dieu.
Des hommes, surtout, qui se sont mis en marche, à la différence des chefs des prêtres et des scribes, qui se bornent à poser des questions mais ne se mettent pas en marche. Les mages, eux, se mettent en marche.
Ils ne voulaient pas savoir beaucoup de choses sur ce qu’ils cherchaient, mais ils voulaient savoir l’essentiel : « Où est le roi des juifs qui vient de naître ? Nous avons vu se lever une étoile, et nous sommes venus nous prosterner devant lui ».
Leur attitude, frères et sœurs, de chercheurs de la vérité, est pour nous aujourd’hui un enseignement. Elle est une mise en garde contre le danger d’un savoir autosuffisant qui n’atteint pas la vérité elle-même. Les mages ont accepté de quitter leurs lunettes astronomiques (leurs smartphones !), pour se mettre en marche.
« Qui n’avance pas recule, dira Saint-Léon-le-Grand, et qui ne gagne rien, perd » … et ils se sont mis en marche.
Des hommes qui cherchent, ce sont aussi des hommes qui savent tomber à genoux. L’attitude la plus noble de l’homme, c’est de savoir tomber à genoux et d’adorer.
Les psychologues, qui parfois nous disent des bonnes choses, nous disent que : pour un enfant chrétien, c’est important de voir son papa qui se met à genoux et qui prie. Ça veut dire que prier, c’est pas seulement pour la mamie ou pour sa mère, mais voir son père se mettre à genoux, voilà qui est beau et qui est grand !
Le texte grec de l’évangile, pour dire cela, emploie un mot qui signifie le geste de la soumission, de la reconnaissance de Dieu comme la mesure de toute chose. C’est ça, l’adoration !
Ce geste de se mettre à genoux, d’adorer, de se prosterner, signifie que la liberté n’est pas simplement de profiter de la vie, de se croire absolument autonome, mais de s’orienter selon le critère de la Vérité et du Bien, pour devenir de cette façon, nous aussi, vrais et bons, comme Dieu est vrai et bon, comme Jésus est vrai et bon.
Ces mages qui adorent sont déjà, en quelque sorte, des acteurs de la Parole de Jésus à la Samaritaine : « L’heure vient et elle est là, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ».
Ces mages qui cherchent, savent se mettre à genoux. Non seulement ils tombent à genoux, mais ils adorent. L’adoration n’exprime pas seulement la soumission, mais l’union ; et dans la situation présente des mages prosternés devant l’enfant Dieu, une soumission qui est provoquée par l’amour. C’est ça, l’adoration chrétienne !
Cet enfant « grand-petit », comme l’appelle Saint Augustin, cet enfant grand-petit, ils se prennent à l’aimer.
Leur démarche, qui les fait entrer dans la maison où se trouvent Jésus, Marie et Joseph – et peut-être l’âne et le bœuf, pourquoi pas – nous dit que pour connaître Jésus, le sauveur, il faut entrer dans la maison qu’est l’Église. Et dans l’Église, il y a toujours de la place pour tous les mages de notre temps, pour tous les hommes de notre temps qui cherchent la vérité sur des chemins souvent broussailleux.
La porte de l’Église est toujours ouverte à ceux qui passent.
Et enfin, autre caractéristique de ces hommes : ils offrent des présents.
« Ils offrirent trois présents à l’humanité du Christ, nous dit Saint Pierre d’Amiens, l’or au roi, au prêtre l’encens, et la myrrhe au mortel ».
Reconnaissant la puissance royale de cet Enfant, ils lui offrent de l’or comme on l’offre à un roi ; reconnaissant Dieu, ils offrent de l’encens ; prophétisant qu’il devait mourir, ils offrent aussi la myrrhe pour sa sépulture. (st Augustin)
Quant à nous, frères et sœurs, en ce jour de l’Épiphanie, présentons-nous aussi à Lui, avec l’or de la charité, l’encens de notre foi et la myrrhe de notre espérance.
Amen !