Homélie de la Solennité de Tous les Saints – 1er novembre, année A

Par le Frère Jean

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.

 

Chers frères et sœurs,

De la sainteté, nos Pères dans la foi, disaient qu’elle est “l’art des arts” (ars artium).

“L’ascèse, disent-ils, ne rend pas l’homme d’abord ‘bon’ mais avant tout ‘beau’. Ce qui caractérise les Saints n’est pas tant la bonté – des gens charnels et des pécheurs peuvent aussi être ‘bons’ – mais avant tout la beauté, à l’image de la beauté du Christ qui est le seul sans péché, et puisqu’Il est sans péché, Il n’est que ‘beauté’.” …puisque le péché enlaidit.

Dans l’Orient chrétien, la beauté est l’autre nom de la sainteté.

Les artistes ont bien su rendre cela ; que l’on pense à la célèbre “ronde des Élus” de Fra Angelico, où celui qui la contemple se sent emporté dans la beauté de la “Ronde des Saints”.

Oui, la familiarité avec Dieu rend l’homme beau.

Dans la langue roumaine, le nom de ‘moine’ se dit călugăr ; ce mot est formé par deux mots grecs : Kalos qui veut dire ‘beau’ et ‘bon’ et geron qui veut dire ‘ancien’.

Il n’y a pas de vie monastique, donc pas de vie chrétienne, sans beauté ; et les saints nous en montrent le visage sous les multiples formes dont la sainteté resplendit à travers les siècles, hier comme aujourd’hui.

“Dans la grande famille du Christ qu’est l’Église, tous les membres se reconnaissent et s’appellent : l’illettré rejoint le philosophe ; la moniale dans son cloître ne diffère en rien d’essentiel de celui qui porte la sollicitude de toutes les églises ; la voix des martyrs chinois du XXème siècle se confond avec la voix du martyr syrien du IIème siècle. 

Dans cet immense concert, nul mimétisme ni accord péniblement cherché, c’est la voix de l’unique Esprit parlant à l’unique Épouse qui retentit en chaque conscience”. Cardinal de Lubac.

C’est dans ce cortège, frères et soeurs, que nous sommes appelés depuis notre baptême à entrer pour y jouer notre propre note musicale, aussi modeste soit-elle ; mais la beauté du concert

n’a-t’il pas besoin de tous les instruments, du premier violon et de la trompette, comme du modeste triangle ? Peu importe l’instrument que Dieu a permis que je sois, l’essentiel est de donner au cours de ma vie le son le meilleur.

En bref d’être ce pour quoi il a été voulu par Dieu.

J’aime cette parole de St Jean Paul II, qui dit que “la sainteté est la source élevée de la vie chrétienne”. De St Jean de la Croix à Ste Thérèse de l’Enfant Jésus, de Ste Catherine de Sienne à la Bienheureuse mexicaine Conchita, c’est la même source, la même passion, le même chant, en chacun la mesure élevée de l’amour de Dieu et du prochain.

Dans la vie des Saints, l’amour pour Dieu et pour le prochain, la recherche de la gloire de Dieu et du Salut des âmes, vont toujours de pair. Les deux commandements que le Seigneur nous a laissés, que nous trouvons déjà dans le décalogue, dans les “Dix commandement” : l’amour de Dieu et du prochain, ces deux commandements demeurent la voie royale de tout chemin de sainteté, donc notre chemin. Jésus y ajoute ce précepte“ Je vous donne un commandement nouveau, c’est de vous aimer les uns les autres… oui, mais de vous aimer comme, Moi, Jésus je vous ai aimés… et continue de vous aimer”.

Et nous savons que la façon dont Il nous a aimés, fut de donner sa vie pour nous, jusqu’à l’extrême de l’amour, jusqu’à l’extrême de la mort.

De ce Don qu’Il nous a fait et qui pour nous a valeur de sacrement, Il a voulu faire aussi un exemple ; après le lavement des pieds, Jésus dit à ses apôtres : “c’est un exemple que je vous ai donné, ce que j’ai fait pour vous, faites le vous aussi.”

On parle aujourd’hui volontiers de la “science des saints”. On fait, par cette expression, allusion à leur intuition des Mystères du Dieu vivant, à leur sagesse, aux dons de l’Esprit Saint qu’ils ont reçus, et qui deviennent un point de référence pour tous les baptisés.

St François de Sales disait de certains Saints qu’“ils sont plus admirables qu’imitables”.

En effet, si tout le monde n’est pas appelé à vivre comme St Antoine le Grand reclus plusieurs années dans une forteresse, ou bien comme St Benoit Labre qui a passé des années à parcourir les routes de France et d’Italie dans une très grande pauvreté, tous, frères et soeurs, sommes appelés à cette mesure élevée de la vie chrétienne dont nous parle St Jean Paul II, et dont nous avons reçu le vêtement au jour de notre baptême.

“La sainteté est le visage le plus beau de l’Église” dit le Pape François.

“Un Saint n’est pas celui qui accomplit de grandes entreprises en se fondant sur l’excellence de ses qualités humaines, mais celui qui permet avec humilité au Christ de pénétrer son âme, d’agir à travers sa personne, d’être le véritable acteur de toutes ses actions et ses désirs, Celui qui inspire toute initiative et qui soutient tout silence”. (Benoît XVI)

Puissions-nous dire avec St Augustin, “ma voix sera vivante, toute pleine de Toi”.

Les Béatitudes, que Jésus proclame aujourd’hui parmi nous, disent cela mieux que tout discours : “Heureux les pauvres de coeur… heureux les doux… heureux ceux qui pleurent”…

Nous pouvons nous attarder un instant sur cette troisième béatitude en la citant entièrement : “Heureux ceux qui pleurent, ils seront consolés”

Mot à mot, on pourrait traduire : ils recevront le Saint Esprit ; être consolé et recevoir le Saint Esprit, dans la langue des Évangiles, c’est le même mot : paracletos.

En cette période de l’année, frères et soeurs, qui est plus exigeante et difficile, non seulement pour les chrétiens mais pour tous nos frères en humanité, nous pouvons regarder comment les Saints ont traversé les épreuves ; comment ils en ont triomphé ; et comment finalement ils ont embrassé le Royaume des Cieux qui leur a été remis en partage et que le Seigneur veut remettre à chacun de nous.

Ce chemin vers le Royaume, avec toutes les tribulations qui se trouvent sur ce chemin, nous le parcourons en Église, nous ne sommes pas seuls, nous le parcourons avec tous nos frères chrétiens baptisés dans la force de l’Esprit, avec le bouclier de la foi et le Saint Nom de Jésus.

Saints et Saintes de Dieu, priez pour nous !

Amen.

 

Historique de nos Homélies

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