Homélie de la fête de St Bernard – 20 août 2021, 20ème Semaine du Temps Ordinaire – Année B

Par notre évêque François Fonlupt

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.

 

Il y a quelque chose d’impressionnant à célébrer St Bernard au cœur même de cette abbaye de Sénanque, et avec ceux qui s’attachent à vivre de ce qu’il a impulsé, de ce qu’il a initié au cœur de même de notre Église.

Quelque chose d’impressionnant, à la fois parce que « qui suis-je » et « qui sommes-nous » pour parler de cette grande figure… mais aussi une vraie grâce que de venir puiser là, en nous tournant vers le Seigneur et en faisant mémoire de St Bernard, de ce qu’il a vécu et accueilli de son Dieu. Je le connais mal, je ne vais donc pas parler beaucoup de lui, mais peut-être simplement nous inviter à accueillir cette Parole que nous venons d’entendre, et peut-être à travers cette Parole, nous inviter à retrouver de Bernard ce qu’il en a déployé.

Il me semble qu’il y a d’abord cette passion amoureuse qui l’a touché, qui l’a animé, et qui l’a conduit tout au long de son existence (si je ne m’abuse, il a écrit un commentaire du Cantique des Cantiques, plutôt au terme de son existence, au terme de sa vie, dans ses dernières années). Comme une manière de méditer sur ce texte si étonnant de la Bible – qui ne se tourne jamais vers Dieu, qui ne parle pas de Dieu – mais qui chante le Bien-aimé, qui nous invite à contempler cette recherche puissante de la rencontre avec le Bien-aimé, comme le psaume nous a aidé aussi à le vivre et à le déployer :

« Seigneur, mon âme cherche ta face ; ne me cache pas ta face. »

St Bernard a été un de ces chercheurs de Dieu, ne cherchant pas simplement un mystère ou une idée de Dieu mais cherchant à rencontrer Quelqu’un, cherchant à se laisser toucher et bruler par Celui qu’il découvrait comme le Bien-aimé, cherchant à se laisser étreindre et marquer par son Sceau. Bernard était un assoiffé de Dieu et il s’est laissé, peu à peu, non seulement attirer mais bruler au feu de cet amour.

Bernard aussi, est celui qui s’est engagé dans cette recherche, de manière radicale en quittant tout, en renonçant aux choses de ce monde ; en essayant de trouver cette liberté par rapport à tout ce qui pouvait l’entraver, pour ne se laisser guider que par la recherche de Dieu, par sa Parole, par son écoute et par la transformation que peu à peu elle pouvait opérer en elle. Et de cette manière, il a très certainement trouvé pour lui l’unité et le centre de sa vie : s’il est rentré au monastère, s’il s’est fait moine, il n’est pas toujours resté dans un monastère, il a beaucoup bougé, il s’est beaucoup déplacé et investi pour le service de l’Église de différentes manières. Mais, sa vie était centrée.

Sa vie était centrée par la prière, par la rencontre avec le Bien-aimé et même si sa vie l’a amené à se déplacer beaucoup et à servir l’Église de bien des manières, cela a été toujours enraciné dans sa rencontre avec le Seigneur.

Bernard est celui qui a étonnamment entrainé à sa suite ; je vous le disais, frères, en vous rencontrant, il y a quelques instants : en venant du Rouergue, on ne peut pas ignorer la Tradition bénédictine et cistercienne. Il a planté dans ce secteur : on a vu surgir, six abbayes cisterciennes dans la deuxième moitié du XIIème siècle. C’est quand même impressionnant, quand on voit ce que sont devenues ces abbayes, quand on voit ce qu’est cette abbaye ici, de se dire que, immédiatement à partir de son impulsion, se sont développées, non seulement en ces lieux mais en tant d’autres en France et en Europe, des lieux de prière, des lieux d’enracinement dans la vie communautaire et dans la vie monastique, des lieux qui voulaient appeler pleinement à inscrire son existence dans la recherche de Dieu.

Cela est un témoignage précieux pour nous tous, et peut-être une invitation à nous redire que aujourd’hui encore, nous avons, les uns et les autres, à nous laisser travailler par la passion qui l’animait. Cette passion d’un Dieu qui nous cherche et qui nous invite à la rencontre avec lui. C’est une invitation à ne pas étouffer cela et à faire que, dans nos vies, qui peuvent être parfois très prises, très actives, très diversifiées… et bien, que nous puissions laisser demeurer cette attente, cet appel que le Seigneur adresse à nos vies, pour le rencontrer véritablement.

Laissons-nous rejoindre par cet amour, par cet amour d’Alliance, par ce Don, par Celui qui nous dit son je t’aime, et Celui dont le je t’aime peut véritablement transformer nos existences, et nous appeler pour nous combler, nous entrainer là où nous ne l’aurions pas imaginé.

Bernard a su en vivre de telle manière qu’il a entrainé beaucoup d’autres aujourd’hui ; et peut-être qu’on peut lui demander cette grâce pour nous-mêmes, pour votre communauté, mais aussi pour notre Église : pour qu’elle sache trouver aujourd’hui la manière de se laisser suffisamment imprégner par cet amour de Dieu, pour en vivre et pour que, par sa manière d’en vivre, elle fasse signe à notre terre et à notre monde d’aujourd’hui.

L’aspiration à vivre, à être heureux, à aimer, à être aimé… elle travaille notre monde comme elle a toujours travaillé quiconque. C’est cela qui nous habite profondément.

Le trésor de Bernard, c’est d’en avoir découvert la source dans sa rencontre avec le Bien-aimé, avec son Seigneur ; il nous appartient aujourd’hui, nous aussi, d’aller puiser à la source pour modestement, simplement, mais réellement, la manifester, lui donner de sourdre, et peut-être permettre aussi à d’autres, d’avoir envie de la découvrir et de venir s’y abreuver.

Que St Bernard, aujourd’hui, éclaire notre action de grâce auprès du Seigneur et qu’il fasse de nous, aussi, des assoiffés de la miséricorde de Dieu et de sa tendresse pour les hommes et pour le monde.

Amen!

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