Lorsque St Benoît instaure ses monastères et écrit sa Règle des moines au 6ème siècle, son monde est aussi troublé que le nôtre. Un monde de conflits, de bouleversement de société et d’affrontements culturels et politiques. Beaucoup de monde circule en quête de lieux de références et de paix.

Ce qui résonne à travers la Règle de St Benoît, c’est un appel et une urgence. Voici que dans la foule Dieu appelle : « Qui désire la vie ! Qui veux voir des jours heureux ! Qui désire le bonheur ? »

Si tu lui réponds : « c’est moi », Dieu te répond : « Si tu veux avoir la vie véritable et éternelle, interdis ta langue du mal et de toute parole trompeuse ; détourne-toi du mal et fais le bien ; cherche la paix avec ardeur et persévérance ». Vaste programme, et cependant si actuel et si urgent. Pour le mettre en œuvre nous avons besoin de découvrir cette paix en nous-même, condition indispensable pour la mettre en œuvre entre nous.

L’Église et le monde, ont besoin que les monastères soient des lieux un peu à l’écart de la communauté ecclésiale et sociale pour se retirer dans la solitude et le silence, conditions nécessaires pour une prière apaisée et profonde. La communauté de St Benoît accueille au seuil de son cloître pour offrir à l’Église et au monde le cadre d’une communauté assurant l’Opus Dei, le « service divin ». À l’exemple du Seigneur « qui est venu pour servir et non pour être servi », cette école du service caractérise la vie du moine, car ce service est école de charité. Ce service divin s’exprime par le service d’une prière ininterrompue, à travers les sept temps de prière de la journée, mais ce service divin s’exerce aussi à travers la mise en œuvre d’une vie fraternelle. Mise en œuvre d’une fraternité qui s’exerce à l’amour fraternel, à l’obéissance mutuelle, à la pureté du cœur, au juste et au bon usage des biens de ce monde. Une fraternité qui s’exerce à poursuivre la paix, à marcher sur les chemins de l’Évangile.

Les monastères sont des lieux de présence de Dieu. Des lieux où chacun peut être accueilli tel qu’il est sous le regard bienveillant de Dieu, regard bienveillant que les frères et les sœurs de St Benoît doivent exercer. Quand le pape St Grégoire écrit la vie de St Benoît, il le définit comme ‘homme de Dieu’, comme quelqu’un qui habitait avec lui-même sous le regard de Dieu. Plus que jamais il manque à notre société ce silence habité d’une authentique parole intérieure, il lui manque un ordre bienfaisant, la prière et la paix.

Le cadre de la vie bénédictine permet ce retour à soi-même dans la présence bienfaisante de Dieu, c’est un chemin de profonde conversion et de profonde réconciliation.

Cette réconciliation ne s’arrête pas à l’individu. La Règle de St Benoît insiste sur l’idéal évangélique de cheminer ensemble. Le Christ nous mène tous ensemble dans le sein de notre Père des Cieux. Le souci de la charité fraternelle et du service commun tient beaucoup de place. Les moines ont le souci du monde, de l’humanité. Ils ont le souci d’un monde juste et en paix. « Paix » est bien une devise bénédictine. Cette humanité est la leur.

St Benoît à l’exemple du Christ ne fait pas acception de personnes. Pour St Benoît, l’accueil est inconditionnel, le Christ est présent à travers toute humanité, pauvres, pèlerins, visiteurs, frères et sœurs dans la foi. Chez St Benoît il n’y a pas de clivages identitaires, le Christ est pour tous. Ceci n’empêche pas une lucidité sur la complexité de la nature humaine et donc la nécessité d’une Règle pour éviter les attitudes ou les comportements inadaptés, mais la visée en est le bien et la vérité au service de tous, et surtout au service de la recherche incessante de la paix, celle que le Christ a instaurée, à laquelle il nous appelle et nous exhorte pour en être les inlassables artisans.

 

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