Frères et sœurs bien aimés,

En ce dimanche 29 Juin, nous célébrons solennellement avec toute l’Église, le martyre de ses deux plus grands fondateurs, les apôtres Pierre et Paul. Alors même que leur naissance au Ciel ait eu lieu à quelques années de distance, la Tradition a toujours voulu les honorer ensemble. Quoique très différents : Pierre, fils de pêcheur de Galilée sans autre formation intellectuelle qu’une certaine connaissance de la Bible, homme spontané, et généreux ; Paul à l’inverse pourrait-on dire, fin lettré, formé à l’école des pharisiens de Jérusalem. Grand penseur, il fut rendu capable sous l’inspiration du St Esprit d’élaborer une théologie de la foi nouvelle révélée par le Christ.

L’Église par-là affirme qu’en dépit de leur vocation différente, Pierre et Paul ont accompli chacun à leur manière jusqu’au terme, leur commune mission fondamentale d’évangélisation ordonnée aux apôtres par le Christ après sa Résurrection. On sait aussi par le récit des Actes des Apôtres qu’ils expérimentèrent des tribulations semblables dans leur ministère respectif ; ils se retrouvèrent à Rome pour donner leur témoignage suprême.

Ce double anniversaire nous touche directement, nous chrétiens d’occident en tant qu’héritiers de la culture gréco-latine, car en dépit des graves persécutions politiques, nous nous souvenons que ce sont les avancées de la civilisation de l’empire Romain qui ont permis la diffusion de l’Évangile dans tout le pourtour de la méditerranée, et même au-delà.

Ainsi très rapidement, l’Église a pu prendre conscience, avec l’assistance de l’Esprit Saint, de son universalité à travers la diversité des cultures qui accueillaient son message de Salut. Le phénomène unificateur de la romanisation contribua pendant les trois premiers siècles à la communication entre les églises. Rappelons-nous qu’au cours du Concile de Chalcédoine au IVe siècle dans la définition doctrinale des deux natures unies dans la seule Personne du Christ, les Pères orientaux approuvèrent la lettre de saint Léon qui « a parlé par la bouche de Pierre » ; au VIIIe siècle, malgré la persistance du désaccord sur la date de Pâque, également il y eut encore consonance doctrinale sur la vénération des saintes Icônes, et l’évêque de Rome gardait toujours sur les autres évêques ou archevêques la primauté.

Malheureusement nous le savons, à la fin du 1er millénaire cette unité fut brisée à cause de tiraillements d’influences de politiques rivales, ou de diverses fixations sur la Tradition, de multiples incompréhensions, aussi, dues souvent à des problèmes de traductions littéraires des Saintes Écritures. Cependant l’Esprit-Saint ne cesse de continuer d’assister l’Église en sorte que depuis le début du XXe siècle, à la suite de l’accélération de l’histoire, de l’influence croissante des autres religions mais aussi de la progression de l’athéisme, les chrétiens ont été comme poussés à se retrouver, à dialoguer, à se rencontrer pour trouver des expressions communes, publiques, à l’encontre de lois sociales hostiles aux règles morales élémentaires découlant de la Révélation judéo-chrétienne.

L’évangile de ce jour, nous rapporte la confession de Pierre à Césarée et nous fait découvrir la volonté du Christ de bâtir une Église bien distincte de la synagogue : aussi confère-t-Il à la personne de son disciple « inspiré » une nouvelle dimension religieuse. Le nom de Pierre fait allusion à la « pierre de fondation du Temple » de Jérusalem, du « roc » qui émergeait du sol dans le Saint des Saints, là où les juifs vénéraient la sainte Présence. En appelant Simon comme « cette Pierre » sur laquelle Il bâtira son Église, Jésus lui communique ainsi sa qualité propre de « fondation » prophétisée par Isaïe et le psalmiste, et qui fait dire à Paul dans sa 1ère Lettre aux Corinthiens : « De fondement, nul n’en peut poser d’autre que Celui qui s’y trouve, à savoir Jésus Christ ». Le Seigneur Jésus donne donc en partage le pouvoir qu’Il possède sur l’Église, Il va lui transmettre la qualité de Pasteur sur toutes ses brebis comme le rapporte St Jean au dernier chapitre de son évangile. Là, le Christ ne se dépouille pas de la « souveraineté » qu’Il possède pleinement sur l’Église mais Il va l’associer à celui qu’Il dénomme « Pierre ».

L’institution à laquelle est remise une autorité aussi complète, constitue une innovation par rapport au grand Prêtre de l’Ancien Testament. Celui-ci restait soumis plutôt aux règlements des offices et des cérémonies du Temple. Pareille initiative relève de l’audace magnanime d’un Maître qui demande une confiance assurée en son disciple de choix devenu chef des apôtres, sur lequel va reposer une vertu spécifique de l’Esprit, à travers les âges.

Il convient de remarquer ici que l’Église n’est pas constituée sur le modèle des autres sociétés de ce monde, son ordonnance hiérarchique sous la mouvance de l’Esprit reste flexible, son obéissance demeure libre et gratuite.

L’exercice de son autorité implique l’authenticité dans le service de l’amour et l’expérience de la foi. On découvre là, on doit le signaler, la réalité d’un grand Mystère où se manifeste la transcendance de la Sagesse divine qui empreinte des voies supérieures à celle de la sagesse humaine pour servir au Salut de tous et accroitre la gloire de Dieu.

C’est donc bien en vue de soutenir notre conversion, notre sanctification, surtout à travers le lieu privilégié de « la liturgie », que l’institution de l’Église trouve sa raison d’être, elle manifeste au plus haut point l’Espérance qui doit habiter au milieu de notre monde tous les chrétiens.

Que Dieu en soit béni ! Amen

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