Chers frères et sœurs,

« Hier, j’ai été crucifié avec le Christ… aujourd’hui, je suis glorifié avec lui ; hier, je suis mort avec lui… aujourd’hui, en lui, je suis rendu à la vie ; hier, j’ai été enseveli avec lui… aujourd’hui, avec lui, je ressuscite ».

Ainsi Saint Grégoire de Nysse au IVe siècle méditait le grand Mystère de ce jour : la Résurrection de Jésus.

« Hier … aujourd’hui » : ce passage d’un avant à un après, dit tout le sens de notre vie baptismale, de notre filiation divine. Avant d’être faits « enfants de Dieu », par l’eau du baptême et par la Parole qui l’accompagne, nous étions étrangers à la vie divine. Maintenant, comme dit l’apôtre Pierre, baptisés, nous sommes « participants de la vie divine ».

Durant cette Nuit de Pâques, frères et sœurs, des milliers de catéchumènes à travers le monde ont reçu le baptême. Dans notre pays, en France, 10 000 adultes ont été baptisés et 7 500 adolescents le seront dans les semaines qui viennent. Et pour cela, nous remercions le Seigneur. Car c’est toujours une grande joie pour l’Église qui, en tant que Mère, accueille en son sein de nouveaux baptisés qui deviennent pour nous des frères dans la foi. La liturgie du quatrième dimanche de Carême le dit bien lorsqu’elle prie pour ceux qui vont recevoir le baptême à Pâques (les catéchumènes) en ces termes : « Donne à ton Église, Seigneur, la joie de transmettre ta vie à ceux qui se préparent au baptême. Par leur naissance de chair, ils sont des êtres de chair ; qu’ils deviennent des fils de Dieu en renaissant de l’Esprit Saint ».

Puissions-nous, quant à nous, ne jamais perdre mémoire de ce jour où nous avons été plongés dans l’eau du baptême ? Que nous n’en ayons pas le souvenir parce que nous étions de petits enfants, ou que nous en ayons la mémoire l’ayant reçu adolescent ou adulte, cet événement, qu’est le sacrement de baptême, nous a communiqué la foi. C’est ce que fait le baptême. Il communique la foi. La foi de l’Église, la foi que les apôtres ont reçue et transmise en ayant, chacun d’eux, adhéré en ce Jésus en qui ils ont reconnu, comme le proclamera Pierre : le Messie, le Fils du Dieu vivant. La foi des apôtres qui a été mise à l’épreuve le Vendredi Saint, quand ils ont vu Celui en qui ils reconnaissaient le Fils de Dieu, mourir sur une croix. La foi des apôtres, quand, au soir du jour de Pâques, ils l’ont vu présent parmi eux, leur apparaissant avec les plaies de sa Passion ; les plaies : les stigmates au sens littéral du terme, plaies encore visibles sur son corps de Ressuscité.

Oui, sans la foi des apôtres, nous ne serions pas là ce matin. Qu’en est-il au juste de ce que nous appelons la Résurrection du Christ ? Jésus n’est pas quelqu’un qui est revenu à la vie biologique ordinaire et qui, par la suite, selon les lois de la nature humaine, devait mourir de nouveau un jour ou l’autre, comme ce fut le cas pour son ami Lazare qu’il a ressuscité, ou bien pour le Fils de la veuve de Naïm (qu’il ressuscita aussi). Mais l’un et l’autre sont morts et ressusciteront à la fin des Temps, comme chacun de nous. Sa Présence physique n’est pas perçue par les apôtres comme une expérience intérieure, une expérience mystique où l’esprit humain est un moment élevé au-dessus de lui-même, comme saint Paul en a fait l’expérience et qu’il raconte dans sa Lettre aux Corinthiens, je le cite : « Je connais un homme qui, voici quatorze ans, fut enlevé au troisième ciel » … Expérience mystique de Paul en sa chair, qui contemple Dieu.

La rencontre des apôtres avec Jésus ressuscité est bien un événement historique et non une simple expérience intérieure aussi sublime soit-elle. La rencontre des apôtres avec Jésus ressuscité est une rencontre avec une Personne vivante en chair et en os. Même type de rencontre que fit Paul, cette fois-ci, sur le chemin de Damas, quand Jésus lui apparaît et lui dit : « Je suis Jésus que tu persécutes ».

La foi que nous avons reçue au baptême ne fait pas de nous des « illuminés », mais des témoins qui adhèrent à une Personne vivante dont nous croyons qu’elle est toujours vivante et présente dans le monde aujourd’hui. Cette Personne, c’est Jésus de Nazareth, qui, par son Esprit Saint, poursuit dans le monde jusqu’à la fin des Temps, la mission que le Père lui a confiée, à savoir : rassembler dans l’unité tous les enfants de Dieu dispersés.

Et tous les enfants de Dieu dispersés, ce sont tous les habitants de la planète qui, en puissance, sont appelés à connaître Jésus et à adhérer librement à Lui.

Avec la Résurrection de Jésus, nous sommes entrés dans une dimension de la vie absolument nouvelle. Ce n’est plus la revitalisation d’un mort quelconque ; avec la Résurrection de Jésus, c’est une vie complètement nouvelle qu’il nous communique, et que nous appelons avec les chrétiens d’Orient : la divinisation.

Dans un instant, nous allons, lors de la Rénovation des promesses de notre baptême, répondre à la question du Célébrant qui nous demandera : « Croyez-vous à la Résurrection de la chair ? » et nous répondrons : « Je crois ! ». Notre « Je crois » aujourd’hui est le même que celui des premiers disciples de Jésus, à commencer par les apôtres, qui ont fait l’expérience de la foi comme étant une force opérante dans le présent, et de la foi qui est aussi Espérance. Ce dont nous nous souvenons particulièrement en cette année jubilaire qui est toute consacrée au thème de l’Espérance. Nous espérons ce que nous ne voyons pas ! C’est cela, la foi ; ce n’est pas une opinion ; c’est une certitude.

Les apôtres sont certains – et nous partageons leur même certitude – que Jésus est toujours présent parmi eux, même alors qu’il est remonté dans la gloire du Père, et qu’il est corporellement invisible à leurs yeux. Il est toujours présent d’une Présence nouvelle et puissante ; et il n’est pas moins présent, frères et sœurs, aujourd’hui, qu’il l’était parmi les apôtres après sa résurrection. Les apôtres savent que Jésus est toujours et jusqu’à la fin des temps auprès d’eux, parmi eux et en eux, de cette forme de présence tout à fait particulière communiquée par l’Esprit Saint, l’Esprit donné par Jésus. Esprit qui a jailli de son Cœur transpercé à la Croix.

C’est pourquoi, lorsqu’un adulte est baptisé, et que le prêtre ou l’évêque verse l’eau sur sa tête en lui disant : « Je te baptise au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit », aussitôt après, il reçoit de l’évêque ou du prêtre l’onction avec le Saint Chrême qui communique l’Esprit Saint !

Donc, frères et sœurs, si certains parmi nous sont baptisés mais n’ont pas reçu le sacrement de confirmation, je vous invite à cheminer et à redécouvrir la beauté de ce sacrement qui communique l’Esprit Saint avec toute sa force et la joie qu’il nous donne.

Oui, frères et sœurs, Jésus n’est pas moins présent dans le monde aujourd’hui, qu’il ne l’était le soir de Pâques lors de ses apparitions. Tout d’abord à Marie de Magdala au petit matin de Pâques à l’aube, puis à Pierre, puis aux onze apôtres qui étaient enfermés au Cénacle, puis à tant d’autres témoins de la Résurrection, comme nous le racontent les Évangiles.

Demandons, frères et sœurs, pour l’Église en ce jour, pour chacun d’entre nous, une effusion de joie ; de cette joie pascale que Dieu seul peut donner, Lui qui en son Fils bien-aimé Jésus nous a tout donné !

À lui soit la louange et la gloire pour le temps et pour l’éternité. Amen, Alléluia !

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