Homélie du dimanche 29 août 2021 – 22ème Semaine du Temps Ordinaire – Année B

Par le Frère Jean-Marie

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.

 

« Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi ».

Frères et sœurs bien aimés,

Ces paroles du prophète Isaïe, reprises par Jésus, orientent le regard de notre âme vers cette relation, ce lien vivant et personnel que Jésus veut avec chacun et chacune d’entre nous.

Nous ne sommes pas appelés à suivre un programme, des idées (fussent-elles pastorales) ; nous sommes appelés à garder le regard de notre cœur, au sens biblique, sur la Personne de Jésus mort et ressuscité. Sur sa croix vivifiante, nous sommes appelés à nous laisser ressaisir en permanence par la vie qui jaillit du Christ en croix.

Le Dieu vivant qui est un feu ardent d’agapè, de charité, nous a envoyé, nous a donné son propre Fils, le Seigneur Jésus, pour que nous ayons la vie en abondance. Dieu voit grand, voit large pour nous… nous sommes toujours en train de compter… le Seigneur nous appelle à l’infini ! Et ce même Fils, le Christ Jésus, est venu allumer ce feu sur la terre, sur la terre de nos cœurs, afin qu’il soit répandu à travers le temps et l’espace dans le monde entier, dans le devenir dynamique de l’histoire humaine.

Frères et sœurs, le Seigneur Jésus nous appelle à vivre un lien d’amour, d’amour d‘agapè. Une relation vivante avec lui ; que Jésus soit quelqu’un dans notre quotidien, dans notre vie, dans nos journées, dans nos nuits.

Nous sommes appelés à vivre cette rencontre dans un mystère d’alliance qui embrasse et unit à la fois la grâce divine, qui vient nous solliciter, et notre liberté humaine afin de porter du fruit en abondance. « Justice et paix s’embrassent » nous dit le psaume 84.

Pour cela le Seigneur Jésus nous appelle, en ce dimanche, à faire la vérité dans notre vie et à mettre en ordre ce qui est de travers. D’un certain côté, ce n’est jamais fini ! Puisque la vie nous entraine dans un mouvement ; et comme un GPS nous sommes bien obligés de suivre le satellite (divin) qui nous remet sans cesse dans le droit chemin.

Ce satellite n’est autre que l’Esprit Saint !

Nous sommes appelés, frères et sœurs, à une cohérence entre notre vie intérieure et les actes, les exigences, de notre vie extérieure, pour soi-même et pour les exigences que nous posons pour autrui.

Jésus n’est pas contre les rites… Jésus était un juif fidèle qui avait une tenue de juif fidèle. Jésus n’appelle pas à faire table rase de tout symbole mais il nous appelle à ne pas tomber dans le durcissement de notre cœur, dans le ritualisme et de faire passer des aspects humains, bons en soi, avant la volonté de Dieu, avant la vie que Dieu veut nous donner et veut donner aux autres à travers nous.

Ne prenons pas les moyens pour la fin ! Les moyens sont au service de la fin. Et quelle est cette fin ? Le Salut éternel des âmes, la sainteté des personnes.

Cette cohérence de vie passe nécessairement par un combat spirituel. Mais ne nous trompons pas!

  • Quand on emploie le mot « combat », on voit tout de suite des muscles, des mitraillettes, des armes puissantes… il ne s’agit pas de cela ! –

Il s’agit de la douceur de l’Esprit Saint qui nous apprend à nous accepter tels que nous sommes… quel programme !

Et d’accepter la vie que Dieu nous donne (et pas celle que l’on rêve ou qu’on aurait souhaitée). Accepter cette aventure d’amour que l’on découvre tout au long de notre vie afin de porter du fruit et d’être unis à Jésus sur la croix pour le Salut du monde. Ce combat nous ouvre à la douceur et à l’humilité du Christ. St Jacques nous disait tout à l’heure « d’accueillir la Parole avec douceur » : douceur envers soi-même, douceur envers les autres.

Nous sommes appelés à discerner ce qui se passe en nous. Et notamment les pensées que nous avons en nous. Ce qu’on appelle dans la Tradition monastique, « le discernement des esprits » : la lutte contre les pensées. Nous sommes appelés à discerner les pensées, les idées, les sentiments, qui habitent au plus profond de nous-mêmes.

Se connaitre, quelque peu, nous restons toujours un mystère à soi-même, et les autres restent toujours un mystère… c’est normal ! Dieu seul connait la créature. Il y a une solitude ontologique – pour employer les grands mots – la solitude de l’être qui fait que même la plus grande union qu’il peut y avoir entre créatures, fait qu’il y a une solitude où on est seul face à Dieu.

Mais se connaitre au moins dans les grandes lignes, avec nos qualités, nos limites et nos failles.

Prendre conscience de notre cinéma intérieur!

Nous avons une salle de projection intérieure qui fonctionne jour et nuit en permanence, qui est gratuite, spontanée, foisonnante. Nous sommes les coproducteurs de ce film incessant. Tout ce que nous vivons dans notre vie, tout ce que nous ressentons, est comme retranscrit en soi-même et passe dans ce cinéma intérieur.

Thérèse de Jésus parlait de la « folle du logis » !

Ce cinéma nous habite, nous sommes appelés à l’accepter, paisiblement, en douceur, mais éviter de rentrer dans le contenu du film !

Nous avons une prise de conscience qui pourrait être analysée à trois niveaux afin de discerner nos pensées : tout d’abord, l’aspect biologique en nous : « j’ai froid ! J’ai faim ! » ; l’aspect psychologique dans lequel notre monde est immergé : tous nos sentiments, tous nos ressentis, nos émotions, beaucoup de communications jouent sur l’émotif, l’émotion – ce n’est pas forcément mauvais mais ça ne va pas en profondeur, et les émotions changent comme l’écume de la mer…- ce niveau biologique, ce niveau psychologique de notre conscience, nous habitent; acceptons-les, avec nos limites, nos failles, les choses qui nous obnubilent, mais vivons au niveau supérieur : notre conscience spirituelle. Là où nous sommes face à Dieu, en intégrant les autres dimensions.

C’est là où nous pouvons discerner ce qui se passe en nous, pas simplement au niveau psychologique (qui est très utile et nécessaire) mais où nous tournons autour de soi-même ; on peut passer notre vie à tourner autour de soi !

Oui ! Nous sommes appelés à vivre attentifs au Seigneur, décentrés de notre « moi » égoïste pour retrouver notre « moi » profond, le point d’ancrage où Dieu est en train de nous créer… l’acte créateur continue, nous sommes créés. Retrouver Dieu à notre point central, là où le baptême nous a recréés… là où la grâce de l’ordination sacerdotale nous a ressaisie… là où nous rencontrons Dieu… là où la Trinité habite en notre âme, au plus profond de notre être. C’est là notre maison, notre appartement, notre château diraient certains, notre cloître.

Oui! Nous sommes appelés à avoir une vigilance sans tension, avec douceur, humilité, bon sens, pour maintenir un cœur pur. Nous sommes appelés à discerner ce qui se passe en nous. À voir nos propres blessures qui engendrent en elles-mêmes des réflexes, des habitudes, des choses qui nous prennent, qui viennent de soi-même. De voir aussi l’influence des autres, influence bonne ou mauvaise, ou des structures de péchés, pour reprendre les mots de St Jean Paul II, qui sont dans la société. Pensons à la pornographie, qui fait un ravage cent pour cent, dans immensément de cas ! Ce qui est étonnant, c’est qu’on parle très peu de la pornographie, chose étonnante ! Alors, qu’elle inonde notre société, des plus jeunes aux plus âgés !

Nous sommes invités à analyser cela et à trancher les choses. La dureté est à éviter; la douceur suppose la fermeté. Notre colonne vertébrale est ferme elle n’est pas rigide; elle nous permet de tenir debout ! Au niveau spirituel, nous sommes appelés à avoir une colonne vertébrale, sans dureté mais sans mollesse.

L’influence des autres et l’influence des forces du Mal :

le Démon existe… qu’est-ce qu’il vient faire le Démon ? Il vient appuyer sur nos limites et nos faiblesses, et nous enfoncer (parfois jusqu’au suicide), pour nous enfoncer dans le désespoir, nous enfermer dans nos limites. Le début de l’enfer !

Le Seigneur est là pour nous ouvrir, nous dilater ; de passer d’un aspect incurvé à un aspect déployé, oblatif.

Oui, frères et sœurs, en ce dimanche, le Seigneur nous appelle à discerner ce qui se passe en nous : tous les aspects mauvais qui jaillissent de notre cœur, pour vivre selon la loi de Dieu, pour vivre selon la loi de la grâce, dans la liberté des enfants de Dieu mais cette liberté demande une exigence, un discernement, une fermeté, une ascèse (: une discipline de vie).

Nous avons tous une discipline de vie ! Sans discipline de vie, nous ne pouvons pas avancer, quels que soient les domaines.

Nous sommes appelés à vivre de cette Alliance d’amour et d’évacuer tout ce qui entrave ou stoppe cette Alliance. Notre ascèse porte là-dessus!

Bien sûr qu’il faut se priver de nourriture, jeûner, se priver d’autre chose… c’est exact. Profondément, l’ascèse va jouer sur tous les éléments intérieurs qui nous détournent de notre relation vivante avec le Dieu vivant.

Ce n’est pas un principe abstrait, c’est très concret, c’est pragmatique : tout ce qui m’arrête doit évacuer ; tout ce qui freine doit être débouché ! – Comme quand on a une artère bouchée on met un stent pour ouvrir l’artère, ou sinon on fait un pontage. Mais il faut faire quelque chose, sinon l’organisme meurt !

Nous sommes appelés à vivre pleinement et à évacuer tout le reste. Donc ce combat est positif! On ne peut baser sa vie que sur du positif pas sur des renoncements…

La vie chrétienne est un feu, une ardeur, vivons là ! Vivre, tendre à une vie unifiée. Que l’extérieur et l’intérieur soient en résonnance, en cohérence, au milieu de nos limites ; nous sommes tous cabossés par la vie ; personne n’est parfaitement équilibré.

Mais d’accepter au cœur de nos limites et de nos fragilités, la puissance de l’Esprit Saint qui fait l’unité dans notre vie et qui nous appelle à être parfaits dans l’agapè – pas parfaits moralement, pas parfaits dans tous les actes que nous posons – accepter nos limites, accepter nos conditionnements, et de vivre dans l’amour !

Que cette Eucharistie nous donne la lumière et la force pour vivre joyeux et paisibles sous le regard amoureux de Jésus.

 

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