Homélie du dimanche 18 Novembre 2018

33ème dimanche du Temps Ordinaire – Année B

Par le Frère Jean

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur

Le style oral a été conservé

 

Chers frères et sœurs, si vous dites en public que vous attendez le retour du Christ à la fin des temps, et que votre vie est orientée vers ce retour… vous risquez de passer soit pour un illuminé, soit pour un disciple de ces nombreuses sectes qui fleurissent de-ci, delà à travers le monde.

Et pourtant ! Et pourtant…la joyeuse espérance de la venue du sauveur à la fin des temps est au cœur de notre foi, et le prêtre demande et appelle cette venue chaque jour à la Messe peu avant la communion.

Cet article de notre foi, frères et sœurs, est commun aux chrétiens et aux juifs. À ce propos, le philosophe d’origine juive, Martin Buber, aimait raconter l’anecdote suivante :

S’adressant à un public composé de prêtres, il disait à peu près ceci : « Quelle différence y a-t-il entre juifs et chrétiens ? Nous attendons tous le Messie » disait-il « mais pour vous chrétiens, il est déjà venu et reparti ; mais pas pour nous. Je vous propose donc que nous l’attendions ensemble, juifs et chrétiens, et lorsqu’il apparaitra, nous lui demanderons « Êtes-vous déjà venu ici en ce monde ? » et Martin Buber d’ajouter « J’espère à ce moment-là me trouver près de lui pour lui chuchoter à l’oreille « Par l’amour du ciel, ne répondez pas ».

Oui, la foi juive comme la foi chrétienne croit en la fin de ce monde et en l’avènement d’un monde nouveau qui aura le visage d’une transformation, d’une transfiguration plus que d’une destruction ; sans nous donner pour autant le détail du scénario à venir. Nous l’avons entendu il y a un instant :

Quand cela aura-t-il lieu ? Comment cette manifestation du Christ sera-t-elle ?

L’unique appui pour répondre à ces questions légitimes est la sainte Écriture, la Parole de Dieu et celle-ci reste très sobre à ce sujet, voire obscure, en disant finalement qu’une seule chose :

« Veillez, tenez-vous prêt ! Quant au jour et à l’heure, nul ne les connait nous dit Jésus pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils mais seulement le Père ».

Cela pour nous signifier, frères et sœurs, que l’essentiel est ailleurs.

Cet ailleurs, c’est la Présence du Christ réelle parmi nous, en ce monde et dans ce monde, tout particulièrement dans son Église.

« Christ au milieu de vous, l’espérance de la gloire » disait saint Paul.

Cet ailleurs, frères et sœurs, c’est encore la foi, qui dès aujourd’hui, sans attendre la fin des temps : la Parousie, avec « l’espérance qui est pour nous comme une ancre de l’âme dit la lettre aux Hébreux bien fermement fixée, qui pénètre au-delà du voile »… voilà l’essentiel.

Cet ailleurs du Christ présent dans le monde, c’est peut-être tout simplement la vie chrétienne ordinaire, initiée par le sacrement de baptême, fortifiée par le don de l’Esprit Saint et nourrie du sacrement de l’eucharistie et du pardon des péchés, qui nous rendent participants dès aujourd’hui de la vie en Christ.

Alors, frères et sœurs, que changera la venue glorieuse du Christ à la fin des temps si dès ici-bas nous le possédons déjà par la foi et par l’espérance ?

Et bien ici-bas nous avons l’image… à la fin des temps nous posséderons la réalité ; ici-bas la possession est partielle… demain elle sera plénière ; ici-bas encore les larmes… demain la joie en plénitude.

Dieu sera tout en tous !

« Notre objectif » dit encore saint Paul aux Corinthiens « notre objectif n’est pas ce qui se voit… ce qui se voit est provisoire mais ce qui ne se voit pas est éternel ».

Il nous faut ici-bas développer les yeux illuminés de l’âme. Nous pouvons par eux saisir le Christ en sa venue dans la chair, dans l’Église, jusqu’à ce qu’il vienne dans la gloire à la fin des temps, sa seconde Parousie.

La première Parousie, manifestation du Christ de Dieu et sa venue dans la chair ; sa seconde Parousie, chaque jour dans la foi, dans l’Église, dans les sacrements ; et sa troisième Parousie à la fin des temps. Nous aurons l’occasion de les réentendre au cours de la période de l’Avent dans laquelle nous allons bientôt entrer.

Ce regard, frères et sœurs, tourné vers l’avènement du Christ à la fin des temps n’est pas une évasion ; loin de nous détourner des réalités de ce monde, paradoxalement il nous y rend plus attentif ! Prendre de la hauteur par rapport aux réalités créées de ce monde nous permet de les voir avec plus de sagesse. Notre amour pour le monde, frères et sœurs, risque de se pervertir s’il n’a pour horizon le Royaume des cieux… car l’humanisme n’est pas spontanément chrétien.

Il ne suffit pas d’aimer les hommes pour aimer Dieu !

L’humanisme chrétien doit être un humanisme converti ! Il faut se perdre pour se trouver !

C’est la loi de l’Évangile. C’est la loi de l’exode. Si nul ne doit s’évader de l’humanité, l’humanité toute entière est appelée à mourir à elle-même, en chacun de ses membres, pour vivre transfigurée en Dieu.

« Vivre en ce monde » disait saint Paul « comme n’y étant pas ». Et la première règle de la communauté de Taizé parlait d’une ‘dynamique du provisoire’.

Faisons nôtre, frères et sœurs, pour terminer, cette parole de saint Louis-Marie Grignion de Montfort qui n’a rien perdu de son actualité, je le cite : « Comme c’est par Marie que Dieu est venu au monde pour la première fois, dans l’humiliation et dans l’anéantissement ; ne pourrait-on pas dire aussi que c’est par Marie que Dieu viendra une seconde fois, comme toute l’Église l’attend, pour régner partout et pour juger les vivants et les morts. »

Oui, Frères et sœurs, en priant, en réfléchissant sur les réalités dernières, ce n’est pas à la crainte que nous sommes conviés mais au désir aimant d’une venue qui comblera le cœur de tout homme, de tous les hommes appelés à être réunis en un seul corps dans le Christ.

Amen !

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